Padmasambhava, souvent appelé "Guru Rinpoché" (le "Précieux Maître"), est une figure centrale dans le bouddhisme tibétain, et il est crédité d'avoir introduit le bouddhisme tantrique et le Dzogchen au Tibet au VIIIᵉ siècle. Selon la tradition, il serait né en Inde et aurait atteint l’éveil sous la forme d’un *mahasiddha* (grand adepte). Légendairement décrit comme né de manière miraculeuse dans une fleur de lotus sur le lac Dhanakosha, Padmasambhava est parfois associé aux lignées tantriques indiennes, mais aussi à la lignée Bön indigène du Tibet, dont il a intégré et transformé certains éléments.
Lorsque le roi tibétain Trisong Detsen invite Padmasambhava pour l'aider à établir le bouddhisme, celui-ci se rend au Tibet. Grâce à sa maîtrise des pratiques tantriques, il parvient à pacifier les forces locales et les esprits, établissant une fondation pour le développement de la première école bouddhiste tibétaine, l'école Nyingma. L'introduction du Dzogchen, le "Grand Perfectionnement", est l'un des aspects les plus importants de son apport spirituel au Tibet. Le Dzogchen, ou "Grande Perfection", est la voie directe vers l'éveil ultime, un enseignement profond qui vise à réaliser la nature de l'esprit dans sa pureté originelle, au-delà des concepts et des efforts de la méditation formelle.
Les enseignements de Padmasambhava sont marqués par leur approche non dualiste : ils mettent en avant que la bouddhéité est innée en chaque être, présente dès l'origine, et qu'il s'agit simplement de la reconnaître. Dans le Dzogchen, Padmasambhava insiste sur l’idée de la "vue" (ou *lta-ba*), c'est-à-dire la compréhension de la nature de l'esprit comme étant claire, sans forme et sans construction. L’un des textes essentiels attribués à Padmasambhava est le *Bardo Thödol*, connu sous le nom de "Livre des morts tibétain", qui offre une guidance pour les moments entre la mort et la renaissance, aidant les âmes à reconnaître la nature lumineuse de leur propre esprit.
L’enseignement Dzogchen de Padmasambhava est souvent transmis sous forme de *terma* (textes cachés), qui auraient été scellés par le maître lui-même pour être redécouverts par des tertöns (révélateurs de trésors) dans les générations futures. Ces trésors permettent de maintenir la fraîcheur et l'accessibilité de ses enseignements à travers les âges, une méthode de préservation unique au Tibet.
Au cœur de l’enseignement Dzogchen, Padmasambhava enseigne les pratiques de "repos naturel" de l'esprit dans son état spontané, une approche dépourvue de fabrication ou d'élaboration mentale. L’un de ses enseignements les plus marquants est : « L’esprit est semblable au ciel, vaste et sans limite, immuable et pure lumière. » La méditation Dzogchen, selon lui, est comme laisser une trace dans l’eau : elle n’a pas besoin d’effort volontaire, car la véritable nature de l'esprit est déjà complète.
Le Dzogchen est différent du chemin progressif : il propose une reconnaissance directe et immédiate de l'éveil. Padmasambhava enseigne également l'importance du *rigpa*, la conscience éveillée, qui perçoit les phénomènes comme spontanément apparus et parfaits en eux-mêmes. La pratique consiste ainsi à cultiver la "vue pure", reconnaissant que toute dualité est illusoire.
Dans l’esprit de Padmasambhava, le Dzogchen n’est pas une simple méditation mais un état de présence totale. Ses disciples sont encouragés à maintenir cette "vue" dans toutes les activités de la vie quotidienne. Ce maître a ainsi laissé un héritage où la sagesse transcende le cadre de la religion : il a introduit une voie où l’éveil n’est pas réservé à une élite mais accessible à tout être, chaque instant pouvant être l’occasion de réaliser cette perfection naturelle.