Sailor Bob Adamson
Bob Adamson, « le marin », a voyagé en Inde dans les années 1970, où il a rencontré Sri Nisargadatta Maharaj. Sa recherche s’est terminée en la présence de Nisargadatta : « Nisargadatta m’a montré la réalité que Je Suis. Maintenant je réside en Cela. ».
Depuis, il partage sa compréhension avec ceux qui recherchent des réponses aux questions essentielles de la vie. Ce livre rassemble des échanges qui ont lieu chaque semaine, chez lui, à Melbourne, en Australie.
« Ce que vous êtes, c’est la pure intelligence qui rayonne. L’idée même de rayonner implique un mouvement. Le mouvement est énergie. Je l’appelle "pure intelligence-énergie". Elle brille dans vos yeux. Vous ne pouvez pas dire ce que c’est, et vous ne pouvez pas non plus la nier. C’est "ri-en", une "non-chose", elle ne peut être objectivée. Son expression, c’est une sensation de présence, un sentiment vivant, vibrant qui se traduit à travers le mental par la pensée "je suis". Cette pensée première "je suis" n’est pas la réalité. C’est le mieux que le mental ou la pensée puisse exprimer de la réalité, car la réalité est inconcevable pour le mental. C’est un non-objet. Sans la pensée "je suis" est-ce la tranquillité, le silence? Ou existe-t-il une pulsation, une vie, un rayonnement? »
Cet enseignement embrasse l'Advaita Vedanta. Il embrasse le Shivaïsme du Cachemire, il embrasse le Dzogchen, la plus haute forme du Bouddhisme. Il embrasse aussi le Christianisme dans sa forme la plus pure.
C'est juste la non-dualité, l'un-sans-second, ou comme il est dit dans la religion chrétienne: l'omniscience, l'omnipotence et l'omniprésence. Il n'y a rien d'autre que Cela. Et s'il n'y a rien d'autre que Cela, qui est le guru et qui est le disciple? Tout est Cela.
Nous connaissons cela dans notre langage, par exemple, "c'est une chaise", "c'est une tasse", "c'est John". Retirez les mots: chaise, tasse, John, que reste-t-il? C'est, tout est Cela. Il n'y a rien d'autre que Cela. Je suis Cela. Vous êtes Cela. C'est Cela.
Q: Qu’en est-il du mot "Dieu"? Êtes-vous à l'aise avec ce mot?
Tout dépend du concept. Vous voyez le mot "Dieu" évoque de nombreux concepts différents pour des gens différents. Pour certains c'est le Christ, pour d'autres c'est Bouddha et pour d'autres encore quelque chose de différent. Si Dieu est l'omniscience, l'omnipotence et l'omniprésence, il est toute connaissance, tout être et toute présence. Je n'aime pas utiliser ce terme "Dieu", car il sera tout de suite, aligné sur une image ou une définition. Je préfère l'appeler l'intelligence-énergie.
On nous a dit que nous étions une personne, que nous étions un individu, une entité séparée. Et tout naturellement, nous l'avons cru et le croyons depuis.
Quand vous êtes un jeune enfant, avant que le raisonnement ne commence, ce n'est pas "je fais ceci ou cela", c'est "Johnny fait ceci" ou "Johnny veut cela" (quelque soit le nom). Johnny ne se voit pas comme une entité séparée. Et puis, quelque temps après, cela devient "je". Le processus de la pensée forme en apparence l'individu. Tout est enregistré tel quel. La pensée, la vue, l'audition, le goût, le toucher et toutes les sensations sont enregistrées dans l'immédiateté du moment. Dès que survient la pensée "je vois" ou "j'entends" ou "je pense", à qui se réfère-t-elle?
Vous voyez ce "je" dans sa pureté ne peut se référer à quoi que ce soit. Avec le processus de la pensée s'est ajoutée à lui l'image que vous avez de votre conditionnement et de votre mémoire. Cette image, c'est ce que vous croyez être. Dès que vous dites: "je suis John" ou "je suis Bob" ou quel que soit le nom, vient immédiatement en corollaire: "je suis bon" ou "je suis nul" ou "je suis spécial" ou tout autre conditionnement, par exemple "je suis heureux", "je suis malheureux", "je suis un docteur" ou "je ne suis qu'un agriculteur et je n'irai jamais loin dans la vie" selon votre croyance ou le conditionnement liés aux événements de votre vie.
Cette pensée "je" est un facteur de séparation. La façon dont le mental travaille c’est seulement par couple d'opposés. Dès que le "je" apparaît, le "vous" ou "l'autre" sont induits, quelque chose d'autre que le "je". L’idée même de la pensée "je" implique immédiatement une séparation, une isolation. C'est la vulnérabilité, c'est la peur.
Q: Comment voyez-vous à travers l'apparence de six milliards d'individus?
En examinant, en essayant de trouver d'abord: qui est ce "je", qui est ce "moi"? Est-ce ce que je pense être? Est-ce ce que je crois être? Qu'est-ce que cette pensée "je"? Restez avec.
Pour le mental, c'est "rien". Ce n'est pas la nature du mental de rester avec "ri-en" (aucune chose). Le mental a besoin d'une image ou d'une apparence, quelque chose pour continuer. Restez avec ce "rien" un moment, et l'idée de peur va se manifester, la peur que "je perde la raison" ou que "je puisse perdre mon identité". Il semble difficile de rester avec ce "rien", car la nature du mental est de penser. C'est un mouvement d'énergie, il fait des va-et-vient permanents. Rester avec "rien" signifie qu'aucune énergie ne va dans la pensée, et ainsi penser ne peut se faire.
Q: De nombreux enseignants disent que personne ne fait jamais rien et que tout est prédestiné. Mais vous dites qu'on peut faire quelque chose: rester avec la question "Qui suis-je?"
Oui mais qui est celui qui fait? Quand vous dites que tout est prédestiné, prédestiné pour qui? Qui doit rester avec la question "Qui suis-je?"
Le seul instrument que possède cette pure intelligence, c'est le mental. L'intelligence fonctionnant à travers le mental n'est rien d'autre que cette pure intelligence qui vibre dans une forme, qu'on appelle pensée. On attribue les pensées à un "moi" ou une entité séparée. Elles ne sont rien d'autre que cette pure intelligence-énergie. Observez et vous verrez qu'il en est ainsi.
Q: Que diriez-vous à quelqu'un qui croit encore être un individu, qui croit être une personne avec un nom? Que lui diriez-vous de faire?
Si quelqu'un vient me voir et me dit: "Je cherche la vérité ou la réalité", je lui dirai: "Ce que vous cherchez, vous l'êtes déjà!" Il est donc absurde de continuer à chercher. Cette recherche a commencé dans le mental, c'est le seul endroit, elle ne peut commencer nulle part ailleurs, et ne peut se poursuivre nulle part ailleurs que dans le mental. Quand je réalise ou quand on me montre, que cela n'a pas de sens de continuer de chercher dans le mental, que se passe-t-il? Si je vous dis: "Stop! Arrêtez-vous, la recherche est finie" que faites-vous? N’y aurait-il pas une pause? Et pendant cette pause n'y aurait-il pas la réalisation du fait que "je n'ai pas disparu", "je ne me suis pas écroulé", "je ne me suis pas désintégré", "je suis encore ici, sans que le mental pense"? Il doit alors y avoir un éclair de compréhension que tout ce qu’en apparence nous croyons, repose sur le mental.
Sans ce mental, le fonctionnement continue. Vous respirez encore, vous entendez, voyez, pensez, vous goûtez, vous touchez et sentez. La vie se poursuit sans que le mental, en apparence, dirige le show, ce qui a toujours été le cas. Une fois que l'on a cet éclair de compréhension que le fonctionnement se fait, se révèle alors un espace de tranquillité. C'est le but de ceux qui font de la méditation, à savoir, de calmer le mental pour trouver cet espace de tranquillité. Je dis que ce n'est pas le bon chemin, car pour calmer le mental, vous avez à utiliser le mental, et tout ce que cela produit, c'est un conflit dans le mental. C'est une pensée qui se bat contre une autre pensée.
En voyant seulement qu'il n'y a pas de réponse dans le mental, vous en êtes libéré. C'est comme si vous veniez chercher votre montre ici, alors que vous savez que vous l'avez laissé dans la cuisine. C'est absurde de la chercher ici. Pendant les vingt ou trente années de votre recherche, à la quête d'une réponse dans le mental, vous ne l'avez jamais trouvée. Vous n'êtes pourtant pas idiot, puisque vous avez résolu nombre de problèmes avec le mental, mais vous n'y avez pas trouvé de réponse à la vie. Viendra sûrement le moment où vous allez réaliser qu'il est futile de chercher dans le mental, et ce, d'autant plus que les traditions vous disent que la réponse n'y est pas.
Traduction de Laya Jakubowicz, que nous remercions ici)
Et voici un autre extrait : "Qu'en est-il dans le sommeil profond?"
R : Le mental est en suspens dans le sommeil profond, mais tout continue de fonctionner sans effort. Le mental n’est pas là, mais la respiration se poursuit, le sang continue d’irriguer tout le corps, les ongles poussent. Tout cela ne s’arrête pas parce que le mental est absent. La conscience ou l’esprit s’agite dans ce sommeil profond, et vous commencez à rêver avant de vous réveiller. Dans ce rêve, vous créez un monde, et vous vous voyez y prendre une part active. Ce peut être dans une ville, une pièce ou alors la campagne. Vous pouvez rêver de toutes sortes de choses. Il peut également y avoir d’autres personnes. Il peut y avoir des voitures, des animaux… et vous vous voyez agir. Pourtant ce corps n’a pas bougé du lit. Tout ce monde apparent pris place dans ce petit espace entre vos oreilles. Si vous continuiez à rêver toutes les nuits et que le rêve continuait d’une nuit à l’autre, comme c’est le
cas dans l’état de veille, pourriez-vous dire quelle est la différence entre l’état de rêve et l’état de veille?
Q : Je ne sais pas!
Q : La conscience dépend-elle de quelque chose d’autre?
R : Ce n’est aussi qu’un mouvement dans la présence-conscience. Tout ce monde apparaît dans cette conscience. Tout ce monde est le contenu de la conscience. Il ne peut-être autre chose que la conscience. Il n’y a rien que vous puissiez penser, concevoir, percevoir, ou postuler en dehors de cette conscience. Même si vous parlez d’autres univers ou d’autres systèmes solaires, le moment où vous y pensez ou en parlez, vous les amenez à la conscience. Quand cette conscience "pensante et parlante" n’est pas, il n’y a que la pure intelligence, qui brille d’elle-même.
Q : La conscience est donc une partie de l’universel?
R : Le tout est l’universel, si vous y regardez de plus près. Il n'y a pas de divisions. La présence-conscience, l’absolu, la conscience, l’esprit ou le mental ne sont qu’une et même chose sous différents aspects. C'est comme l’eau, vous avez l’eau vapeur, l’eau liquide et aussi la glace. Ce sont trois aspects d’une seule et même chose: l’eau. Ils ne sont donc jamais différents de ce non-duel "un-sans-second". Enregistrez bien cela et gardez le en vous: peu importe ce qui apparaît, c'est encore et toujours l’Un. Alors le sentiment de séparation n’a plus sa place.
Un dernier extrait :
Ce "je suis" est seulement la traduction par votre esprit de ce sens de la présence, cette conscience d'être présent, ou cette présence de la conscience.
C'est la seule réalité dont nous soyons absolument certains. Personne, dans aucune circonstances ne peut s'écrier "je ne suis pas !" Cette connaissance est constante et toujours nôtre. Et c'est pourquoi nous disons que vous cherchez ce que vous êtes déjà.
Nous basons notre exposé sur ce que les traditions anciennes nous disent. Dans l'Advaita, par exemple, ils l'appellent non-duel --un sans un second. Cet "un-sans-un-second pourrait signifier qu'il y a quelque chose d'autre que le "Un". Dans le Dzogchen, ils l'appellent "non-conceptuel", "toujours-nouveau", "auto-brillant", présence consciente, juste cela et rien d'autre. Si vous regardez cela, cela vous décrit, vous, moi et tout autre chose. Cette présence vigilante est non-conceptuelle. Vous n'avez pas à avoir de concept à son sujet. C'est toujours nouveau parce que cela n'a ni commencement, ni fin. C'est brillant en soi comme le soleil. Cela brille de soi-même. Il n'a pas de besoin de lumière pour dire "je brille". Et c'est ce qui est, juste ce dont vous ne pouvez vous échapper ni mettre à distance --présence-conscience.
VIDEO INTERVIEW EN ANGLAIS SOUS_TITRABLE