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AMOUR ET NON-DUALITÉ

Conscience d'Unicité fondamentale à la base de notre vie.

 Les communicants en non-dualité concluent souvent leur satsang par "c'est l'amour inconditonnel!" Or, on pourrait se demander pourquoi l'amour pointe le bout de sa flèche en cette matière de non-dualité qui est davantage de l'ordre de Jnana (la Connaissance) plutôt que de Bakti (la Dévotion). Il se trouve que dans le Dzogchen Beün, l'importance du guru yoga est indiquée de nombreuses façons. Le guru yoga est une dévotion envers son guru, son rinpoche, la lignée des maîtres voire un maître des temps anciens comme Guru Rinpoche, alias Padmasambhava, maître précieux du VIIIème siècle, dont l'enseignement est aussi abrupt et immédiat que certains non-dualistes d'aujourd'hui.

D'où vient le sentiment d'identification avec l'objet de nos perceptions? Comment se fait-il que nous ayons tendance à nous prendre pour qui ou ce que nous regardons? Tendance, parce que tous ne vivent pas cela, et que la structuration de la personne finit par limiter ou éliminer cette identification externe. Mais l'enfant qui s'identifie à son père, à sa mère, l'état amoureux nous ont établi parfois dans cet introjection, faire « mien » cette image de quelqu'un à l'extérieur... l'image du monde coloré de notre état amoureux. "Je suis amoureux du monde entier" déclame l'amoureux transi ! Cet état serait-il possible dans un univers vide de sens, vide de conscience, vide d'Êtreté ?

Thèse : On peut comprendre cette identification naturelle par le fait que notre cerveau reflète le monde entier, s'en fait une image cérébrale, à laquelle nous avons accès par les nombreuses connexions neuronales transversales, entre les différentes aires cérébrales spécialisées. Ainsi nous constatons avec justesse que cette image, c'est nous aussi, présents dans des aires adjacentes corticales. Au-delà de ces considérations physiologiques, si tout est conscience et pas seulement vécu comme conscience, alors il est là aussi naturel que cette communion, cette union avec l'environnement se présente assez facilement, surtout dans la petite enfance, dont nous gardons un sentiment de plénitude souvent nostalgique.

Remontons dans le temps. La source de cette expérience pourrait être dans notre vie intra-utérine et notre prime enfance, période Edenique où nous étions de fait non-séparé de notre mère, voire de tout ce qui est, ce qui était de notre environnement restreint in utero, du fait que le cerveau était encore bien incapable de faire la moindre différence. Etait-ce si beatifique que cela ? Peut-être que la chimie cérébrale a prévu quelques médiateurs pour supporter l'enfermement utérin? Comme au moment de la mort, il y a inondation de médiateurs dans le cerveau qui entraînent un état extatique. Un dernier feu d'artifice. Dixit les nombreuses personnes qui ont vécu une NDE near death experience, qui sont morts cliniquement, EEG plat, et sont revenus parmi nous. Bref, gageons donc que l'état endo-uterin est indéfini au départ, puis agréable, l'inverse serait terrible. Nous pourrions démontrer cela en faisant des prélèvements sanguins sur la veine du cordon ombilical, comme cela se fait parfois pour  un diagnostic prénatal.

 Mais si nous mettons de côté ces concepts neurobiologiques et explorons l'antithèse, l'unité ne va pas de soi... pourquoi ce sentiment fondamental d'unité? En partant de rien, d'une perception morcelée du monde, il nous faut construire un tout, si possible harmonieux susceptible de nous offrir un sentiment de bonheur. Or il semble que nous n'ayons pas à construire cette unité, mais qu'elle soit fondamentale, présente à la base de notre vie et qu'il nous suffise de laisser de côtés les distinctions, les différences, les oppositions pour qu'elle émerge.

Amoureux, j'intronisais en moi la bien-aimée. Je souriais? C'était elle qui souriait ! Mais je m'étais rendu compte également que je devenais aussi tout ce qui est. L'Unité ressurgissait dans ces périodes bénies d'une vie adolescente rêveuse. Et pourquoi cela, finalement? Il ne va pas de soi que ce sentiment si rapide à ressurgir de notre inconscient soit présent. Voyez vous ce que je veux dire? Ne serait-il pas au contraire normal que dans un univers froid et purement matériel, si l'on en croit de grands experts, le morcellement soit la règle? Même la vie intra-utérine ne serait pas en soi de nature à nous donner spontanément un sentiment d'unité... Voyez-vous?

Allons maintenant à la synthèse :

Ce sentiment d'unité semble donc venir de la nature des choses. De la nature de l'univers, de la conscience, comme une propriété inhérente.

 Maintenant, observez avec moi : si j'ai l'image d'un « moi » défini, séparé, une image basée en général sur la séparation de ce corps d'avec les autres corps et l'environnement, alors je vais avoir naturellement une identification personnelle. Exemple, j'aime tellement un chanteur, je m'identifie à lui, je deviens lui, j'adopte ses comportements, attitudes visibles, sa façon de marcher, de s'habiller jusqu'à ce que ma nature reprenant le dessus, j'abandonne ces introjections... Faisons un pas de plus :  si, béni par la constatation d'une absence de « moi », constatation basée sur l'observation des flux intérieurs qui manifestement n'ont pas d'auteur particulier, sans image de « moi », alors que se passe-t-il? L'identification « personnelle » est absente. Mais l'identification à tout ce qui est éclate comme une réalité fondamentale de la vie alors qu'il pourrait n'y avoir qu'un vide froid et morcelant. Mais au contraire, c'est l'unité qui ressort inéluctablement. Tout ce-qui-est constitue alors « ma nature non-séparée ». Voyez-vous le saut?

 

Aussi peut-on dire que si l'unité naturelle ne va pas de soi dans l'univers des matérialistes, elle démontre finalement la présence de l'amour, de la conscience non-séparée au fondement de tout ce qui est. Je suis tout ce-qui-est naturellement et sans effort, sans pensée ni concept ; cela s'impose à cette conscience et à ce coeur dès qu'elle congédie le « moi » qui sépare. Et même l'amour du petit « moi » nous montre parfois fortement cette présence de l'amour fondamental. N'est-ce pas la perfection ???